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La fable du bouteur sur chenilles et de la tortue d’Herman

Le non-respect des clauses environnementales peut entraîner la résiliation du bail.

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L’histoire

Le 1er juin 2016, une commune corse avait donné à bail à Céline divers parcelles de terre en vue d’une culture d’immortelles et de l’exploitation d’une oliveraie. Le bail obligeait, à titre de clauses environnementales, à créer des surfaces en herbe au niveau de l’oliveraie et à « ouvrir » l’ensemble des parcelles actuellement embroussaillées ou menacées par l’embroussaillement. Céline qui souhaitait remettre en état les parcelles louées, avait procédé à des travaux de défrichement de certaines parcelles et avait débarrassé l’une d’entre elles de carcasses de voiture laissées à l’abandon.

Le contentieux

Estimant que Céline n’avait pas respecté ses obligations contractuelles, la commune avait saisi le tribunal paritaire des baux ruraux en résiliation du bail. Selon l’article L. 411- 27 alinéas 3 du code rural, des clauses visant au respect par le preneur de pratiques ayant pour objet la préservation de l’environnement, la prévention des risques naturels et la lutte contre l’érosion, peuvent être incluses dans les baux. Et le bailleur peut demander la résiliation du bail en cas de non-respect.

Pour la commune, la cause était entendue. Céline avait entrepris des travaux de nettoyage avec un gyrobroyeur et un engin chenillé qui avaient détruit des habitats d’espèces protégées. La résiliation du bail s’imposait.

Mais Céline ne l’entendait pas ainsi. Le débroussaillage avec enlèvement de carcasses de voitures auquel elle avait procédé était conforme aux clauses environnementales car il constituait une opération préparatoire aux plantations et exploitation d’immortelles et d’oliviers prévue par le bail.

Les juges ne l’avaient pas suivie. Le bail prévoyait l’obligation d’ouvrir les parcelles embroussaillées ou menacées de l’être et de les maintenir débroussaillées, de ne pratiquer ni l’écobuage ni le brûlage dirigé et de ne pas modifier l’aspect du paysage sans le consentement de la bailleresse. Or Céline avait utilisé un gyrobroyeur et un bouteur à chenilles, qui avaient entraîné la formation d’andains nécessitant une élimination par brûlage, dommageable pour l’habitat de la tortue d’Herman ; et la lame et le poids de l’engin chenillé avaient porté atteinte à un certain nombre de tortues. Aussi, les pratiques de Céline étaient bien en contradiction avec les clauses environnementales du bail, justifiant sa résiliation. Saisie par Céline, la Cour de cassation n’a pu que confirmer cette solution.

L’épilogue

C’est la loi d’orientation du 5 janvier 2006 qui a introduit « en creux » le bail environnemental, qui relève du statut du fermage. Désormais, le bail peut contenir des clauses visant au respect par le preneur de pratiques culturales fixées par décret. En réalisant des travaux qui n’étaient pas ceux limitativement prévus par les conditions environnementales du bail, Céline a été imprudente.

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